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42 logements en terre crue à Bagneux, France, TOA architectes associés

42 logements en terre crue à Bagneux, France, TOA architectes associés

Article architecture

Pour la conception de cet immeuble résidentiel situé en plein cœur d’un écoquartier, le cabinet TOA a adopté une approche durable et bas carbone, mettant en avant des performances environnementales dans les processus de construction comme dans le choix d’un matériau local géo-sourcé et recyclable : la terre crue.

Le premier immeuble en briques de terre crue d’Ile-de-France

Au cœur de l’écoquartier Victor Hugo de Bagneux, cet immeuble résidentiel en terre crue comprenant 42 logements ouvre le champ des possibles. Il propose une reconnexion à la terre, source inépuisable de bien-être et de sens. Naturelle et disponible, la terre crue présente un bilan carbone très faible et est recyclable à l’infini. Sa capacité à réguler l’hygrothermie des espaces valorise le confort de vie de l’habitat.

D’une superficie de 1 078 m2, l’immeuble se trouve sur un terrain rectangulaire d’environ 21 m par 50 m. Sa construction consiste en un colombage de béton, structure principale du bâti et support des menuiseries extérieures en bois, avec un remplissage en briques de terre crue fabriquées selon la technique de l’adobe. La brique de terre crue est ici donc associée à une structure apparente en béton. Coursives et balcons offrent une typologie de plan avec 100 % de logements traversants et protègent les façades en adobe des intempéries. Les niveaux supérieurs en attiques offrent de vastes terrasses périphériques pour les duplex des niveaux hauts.

Des performances environnementales de premier plan

Le projet embrasse une approche durable et bas carbone, mettant en avant des performances environnementales tant au niveau du choix du matériau que du processus de construction et privilégiant l’utilisation de la terre crue locale en tant que matériau géo-sourcé et recyclable. Les briques de terre utilisées ici proviennent de la briqueterie de Wulf ; artisanale, faiblement mécanisée et séchée naturellement à l’air libre, sa fabrication débute avec l’extraction de la terre dans une carrière picarde à 80 km de Paris et se poursuit par sa transformation en usine. À la briqueterie, les argiles et les sables sont mélangés à l’eau pour atteindre un état plastique, puis extrudés pour former les briques de terre. Ces briques subissent enfin un séchage à l’air libre pendant quelques jours pour obtenir leur aspect final. Cette technique génère très peu de déchets et aucune fourniture n’est jamais perdue. Les matériaux restants et les chutes (briques et mortier de terre) retournent chez le fournisseur pour être revendues ou réinjectées dans la chaine de production.
L’utilisation de la terre dans la construction offre des avantages thermiques significatifs grâce à son inertie thermique, régulant la température de manière efficace et réduisant ainsi les besoins en chauffage et en climatisation. La régulation hygrothermique, essentielle au projet, tire parti des propriétés de la terre crue pour maintenir un équilibre optimal d’humidité, améliorant le confort des occupants et minimisant la nécessité d’équipements de régulation de l’humidité. Sur les balcons et les coursives, les murs en terre abaissent la température ressentie. Dans les séjours, les cloisons séparatrices en terre crue apportent inertie et régulation hygrothermique.

Une approche sociale

L’intégration de la terre dans le projet vise à démocratiser l’utilisation de ce matériau qui, en plus d’être plus coûteux que le béton, n’est pas ou peu réglementé. Il était essentiel de sensibiliser la maîtrise d’ouvrage à cette question et démontrer qu’une construction en terre crue était possible. L’impact social s’étend au chantier, où les différents corps d’états ont appris à se familiariser avec la terre. Les visites de chantier ont été l’occasion d’accompagner les acteurs de la construction dans la réalisation du projet grâce au partage d’expériences, d’outils et d’astuces. Enfin, 60 % des maçons travaillant sur le chantier sont des femmes, marquant un changement significatif dans le secteur de la construction et contribuant à la féminisation du secteur.

Une valorisation des savoir-faire

En l’absence de Document Technique Unifié (DTU) pour la mise en œuvre des briques de terre crue, les architectes ont collaboré avec des experts du domaine dans une démarche d’expérimentation visant à contribuer à l’établissement de règles professionnelles futures. Des tests approfondis ont été effectués sur les briques, le mortier, les accessoires d’attaches et les parois extérieures, illustrant ainsi l’approche innovante du chantier. Les interactions entre l’entreprise terre et les autres corps de métier sur le chantier ont joué un rôle crucial dans cette démarche, leur permettant d’appréhender plus sereinement la fusion entre leurs ouvrages et les murs en terre. La façade étant en terre crue, la temporalité du hors d’eau a dû être adaptée, ce matériau étant sensible à l’eau.

Datas

Prix mur en terre : 562 €/m2 - 2570 €/m3
Prix mur béton : 171 €/m2 - 857 €/m3
Maître d’ouvrage : Groupe Gambetta
Programme : 42 logements en accession
Superficie : 2 960 m2
Coût : 4 930 000 € hors taxes
Surface de murs en terre : 457 m2
Terre utilisée : 200 tonnes
Mandataire : TOA architectes associés
Partenaires : Vpeas, BETerre, Zefco, Ava, Bérim

Textes originaux & illustrations : © TOA architectes, Frédéric Delangle, Yang Zhou
Synthèse et adaptations : Régis Bigot – Innovation Project Manager Neobuild GIE

Extrait du Néomag#63

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Publié le lundi 1er juillet 2024
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