
Le point sur la feuille de route construction bas carbone
Lancée en septembre 2023 et chapeautée par le CNCD, la stratégie de décarbonation du secteur de la construction vise à accompagner l’ensemble des parties prenantes du secteur de la construction dans la mise en œuvre des objectifs de l’Union européenne en matière de réduction des émissions de CO2
Interview de Paul Schosseler (à gauche) et Bruno Renders (à droite), coprésidents du CNCD.
Quel était l’objectif de la 1re phase de la stratégie de décarbonation de la construction visant à atteindre les objectifs de – 55 % d’émissions de CO2 d’ici 2030 et de neutralité carbone à l’horizon 2050 ?
Les projets de la feuille de route, menés entre septembre 2023 et fin 2025, ont servi à collecter des données nécessaires pour pouvoir définir le point de départ et fixer des seuils d’empreinte carbone applicables aux bâtiments neufs à partir de 2030. Le CNCD étant, par définition, un organisme public-privé qui regroupe cinq ministères et tous les acteurs privés de la chaîne, nous l’avons fait de manière collaborative, au sein de séminaires et de groupes de travail et de réflexion.
Où en est-on aujourd’hui ?
Nous disposons de données fiables. Elles sont en cours d’interprétation. Les données des chantiers des entreprises de construction vont être croisées avec celles des architectes et ingénieurs car la vision qui consiste à séparer la conception de l’exécution est obsolète : pour mener des actions pertinentes, nous avons besoin d’une approche transversale qui prend en considération à la fois les émissions incorporées – l’énergie grise liée à la construction d’un bâtiment – et les émissions opérationnelles – celles qui sont liées à son usage. Il faut travailler sur l’ensemble de la chaîne.
Que va-t-il se passer par la suite ?
Une fois ces données analysées, nous déterminerons, avec l’autorité publique, des seuils compréhensibles, atteignables, qui serviront de base à un cadre adapté aux réalités du secteur.
Nous travaillerons en parallèle sur la mutation des compétences des entreprises de toute la chaîne et de leurs salariés, pour leur permettre de mettre en œuvre les solutions qui émaneront de ces réflexions.
Ce sera d’ailleurs le dernier point : trouver des voies de décarbonation. Elles peuvent être réglementaires, liées à la conception, à l’usage, aux compétences, aux matériaux, à la technique... Elles sont multiples et nous faisons partie de ceux qui pensent qu’il est parfaitement jouable de réduire dès aujourd’hui les émissions d’un bâtiment avec les solutions qui existent. Ce n’est pas seulement une question de moyens financiers. Il s’agit avant tout de repenser notre manière de penser et de faire.
La collaboration, la transversalité sont des notions qui reviennent souvent…
Il existe plusieurs façons de résoudre les problèmes, mais la plus efficace est de le faire en croisant les points de vue des ministères concernés, des concepteurs et des entreprises de construction, car un obstacle administratif ou réglementaire peut très bien passer inaperçu pour un architecte ou un ingénieur, alors qu’il constitue un vrai blocage pour une entreprise d’exécution. Et, à l’inverse, certains éléments considérés comme des freins par les concepteurs ou par l’autorité publique peuvent être facilement levés par une entreprise, simplement parce qu’elle a déjà de la solution.
C’est là que l’échange collaboratif et transversal a toute son importance. Nous devons nous concentrer sur les solutions, la levée des obstacles et l’accompagnement de l’ensemble des acteurs de la construction durable, et agir sur plusieurs leviers.
La prochaine étape passera par une approche non plus en silos, mais par un travail conjoint entre l’OAI, le CDEC et le gouvernement, pour permettre aux différentes parties prenantes de partager leurs contraintes, mais aussi les solutions qu’ils identifient. Nous allons donc avancer de manière beaucoup plus collective.
Mélanie Trélat
Article paru dans Neomag #75 - décembre 2025
