
Approche intelligente de la maintenance des installations techniques
La mise en place d’une gestion technique centralisée (GTC) sera obligatoire dans les grands bâtiments tertiaires à partir de 2025. Et si nous pouvions utiliser les données récoltées par cette GTC à d’autres fins que la régulation et le suivi énergétique ?
L’utilisation de ces données ouvre la porte à de nouvelles fonctionnalités telles que la maintenance prédictive des installations techniques du bâtiment.
Le système de chauffage, de ventilation et de climatisation (HVAC) d’un bâtiment joue un rôle crucial en matière de confort et de santé de ses occupants. Un système HVAC mal entretenu peut rapidement transformer un espace accueillant en un environnement inconfortable et énergivore.
Dans les grands bâtiments, la maintenance du système est souvent confiée à des entreprises spécialisées. La stratégie de maintenance est alors formalisée par un contrat de maintenance qui spécifie clairement les exigences et les objectifs à atteindre.
Les différents types d’actions de maintenance
Au cours de l’exploitation d’un bâtiment, de nombreuses pannes peuvent survenir et affecter le fonctionnement normal des installations. Ces pannes sont généralement dues à l’usure progressive des composants ou à leur encrassement au fil du temps. Une intervention rapide par un technicien qualifié s’avère dès lors nécessaire. C’est ce que l’on appelle la maintenance corrective (voir schéma). Elle peut être programmée en urgence ou de façon différée selon les règles définies dans le plan de maintenance.
Il est également possible de prévenir les risques de défaillance ou de panne par la mise en place d’une maintenance préventive. Contrairement à l’approche corrective, elle permet :
- le maintien du confort et de la santé des occupants,
- le maintien de la performance énergétique des systèmes, réduisant ainsi la consommation d’énergie et les émissions de CO2 du bâtiment,
- la réduction du nombre d’interventions d’urgence,
- la prolongation de la durée de vie des équipements,
- la prévention des effets dangereux ou des effets en cascade d’une panne.
La maintenance préventive peut être de deux types : systématique ou conditionnelle.
La maintenance systématique consiste à réaliser des actions préventives à intervalles réguliers, soit en fonction du temps écoulé depuis la dernière intervention, soit en fonction du temps de fonctionnement de l’équipement. Ces actions peuvent inclure des inspections, le nettoyage ou le remplacement de parties de l’équipement.
La maintenance conditionnelle, quant à elle, permet de mieux cibler les actions à mener et les équipements à remplacer de façon préventive. Celle-ci repose sur des observations ou des indicateurs laissant présager l’imminence d’une défaillance. Ainsi, contrairement à la maintenance systématique, elle évite le remplacement prématuré d’équipements encore capables d’assurer leur fonction. Cette méthode demande cependant de récolter des données sur l’élément étudié (équipement, système, …). Elle se décline en deux sous-catégories : la maintenance conditionnelle non prévisionnelle et la maintenance conditionnelle prévisionnelle, souvent appelée maintenance prédictive.
Dans le cas de la maintenance conditionnelle non prévisionnelle, des seuils sont établis sous forme de règles explicites pour certains paramètres de l’installation (débit, température, perte de pression, …), et leur dépassement indique que l’élément étudié pourrait être en train de dysfonctionner. Pour définir des règles appropriées, cette approche nécessite donc une connaissance approfondie du fonctionnement du système et de ses plages de fonctionnement acceptables.
Avec l’avènement des systèmes HVAC modernes équipés de logiciels de gestion technique centralisée (GTC), de nombreuses données relatives aux installations techniques deviennent accessibles. Ainsi, de nombreux équipements bénéficient déjà de la maintenance conditionnelle non prévisionnelle, par le déclenchement d’alarmes en cas de dépassement de seuils prédéfinis.
Pour appliquer la maintenance prédictive, les données sur le fonctionnement de l’installation sont également exploitées. Des méthodes d’analyse plus poussées, utilisant ces données et leur historique, permettent alors de déterminer si l’équipement fonctionne comme attendu. Ces méthodes avancées sont plus performantes, car elles sont capables d’identifier des anomalies plus subtiles et, par conséquent, de détecter des dysfonctionnements à un stade précoce.
Le potentiel de la maintenance prédictive
Dans le cadre de la réglementation PEB, la mise en place d’une GTC sera obligatoire pour les grands bâtiments tertiaires à partir de 2025, et pour les plus petits, à partir de 2030. Les données récoltées sur l’installation seront donc disponibles dans tous les bâtiments concernés. Pour rendre possible la maintenance prédictive, les coûts se limitent alors au développement et à l’intégration de méthodes d’analyse dans l’environnement de la GTC. Si les méthodes de prédiction applicables au bâtiment se multiplient, on peut s’attendre à ce que leur intégration soit facilitée dans les futurs systèmes GTC.
La maintenance prédictive ne concerne pas uniquement les grands bâtiments équipés de GTC. En effet, elle peut aussi être implémentée à l’échelle d’un équipement (chaudière, pompe à chaleur, …) ou de plus petites installations techniques. Les fabricants ont la possibilité d’intégrer dans leur module de contrôle interne des fonctions permettant de prédire l’arrivée d’une panne ou d’améliorer leurs systèmes d’alerte grâce à de nouvelles méthodes d’analyse, en limitant les « fausses alertes ».
Afin de suivre ces innovations de près, Buildwise participe actuellement au projet PREMAI (PREdictive Maintenance using AI) qui vise l’implémentation pratique de la maintenance prédictive dans un bâtiment non résidentiel équipé d’une GTC. Ce projet, soutenu par Innoviris, explore le potentiel de l’intelligence artificielle (IA) pour le développement des méthodes d’analyse de données sur lesquelles se base la maintenance prédictive. L’IA est en effet une approche prometteuse en raison de sa capacité à analyser automatiquement des volumes de données importants et à apprendre les circonstances des pannes en vue de les anticiper.
S. Bernard, J. Vinel, T. Delwiche, Buildwise
Article paru dans Neomag #70 - avril 2025
Cet article a été rédigé dans le cadre de la Guidance technologique C-Tech subsidiée par Innoviris.